Est-ce que nous allons laisser l’obscurantisme l’emporter sur la liberté, la nuit sur les lumières, l’hiver russe sur le printemps démocratique ukrainien ? C’est très exactement cette question qui se pose à nous aujourd’hui. Oui, à nous, Européens et, parmi nous, aux citoyens autant qu’aux décideurs politiques.

Certes, il serait facile – et beaucoup cèdent à cette facilité – de restreindre la lecture de l’agression russe de l’Ukraine à une analyse purement géopolitique, froide et élégante, de parler du retour des empires, des jeux de puissances, de s’interroger sur l’avenir du multilatéralisme et de l’ordre international fondé sur des règles. Mais c’est quelque chose de beaucoup plus concret et de plus fondamental encore qui se joue à Bakhmout ou à Kherson. Ce pour quoi le peuple ukrainien se bat depuis dix mois, c’est ce sur quoi nous sommes confortablement assis depuis des décennies : le socle de valeurs qui articulent le fonctionnement démocratique des sociétés européennes. C’est cela même que Vladimir Poutine cherche à abattre, c’est cela même que Volodymyr Zelensky s’efforce de préserver. 

Si les Ukrainiens se battent parce qu’ils se sentent Européens et veulent le rester, nous avons le devoir de les aider à vivre. 

— Nathalie Loiseau

Le paradoxe tient au fait que nous ne sommes pas en guerre alors que ce combat est profondément le nôtre. Selon la façon dont cette guerre s’achèvera, ce ne sera pas seulement le sort de l’Ukraine qui en dépendra mais aussi celui de toute l’Europe. L’issue de la guerre d’Ukraine conditionnera notre destin, bien davantage qu’elle n’impactera l’avenir des Etats-Unis. 

Que Washington ait choisi de soutenir l’Ukraine est une bonne nouvelle, presque une bonne surprise tant les yeux de l’Amérique sont tournés vers l’Asie. Mais à terme nous autres Européens avons bien plus à attendre, à espérer ou à redouter de l’issue de la guerre d’Ukraine. Nous autres Européens devons tout faire pour que notre continent ne vive plus sous la menace militaire de la Russie. C’est à l’évidence beaucoup plus important pour nous que pour quiconque. 

C’est pour cela que nous devons accroître encore les chances d’une victoire militaire de Kyiv, en augmentant notre aide, en renforçant les sanctions vis à vis de la Russie et en contrôlant beaucoup plus strictement leur application en luttant contre leur contournement. C’est la responsabilité des dirigeants européens d’agir avec détermination, fermeté et à l’unisson dans ce but.

Mais ce n’est pas tout. Aujourd’hui les civils ukrainiens sont la cible incessante de frappes russes qui effondrent les habitations et les privent de lumière, d’eau et de chauffage. Nous tous pouvons et devons leur venir en aide. Financer l’envoi de générateurs, de transformateurs, aider à la mise en place de points de chauffage à travers les villes ukrainiennes n’est pas seulement la responsabilité de nos gouvernants. Régions, départements, communes, associations peuvent y contribuer et tisser ce lien de solidarité entre Européens. Si les Ukrainiens se battent parce qu’ils se sentent Européens et veulent le rester, nous avons le devoir de les aider à vivre. 

 

Cette tribune est écrite par Mme Nathalie Loiseau pour l’association Stand With Ukraine. Elle est publiée avec la permission de l’auteure.